Page:Guèvremont - Le survenant, 1945.djvu/170

Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
LE SURVENANT

— Ouais, mais tu nous houilles ! C’est pas parce qu’une chose est bonne…

La bru se cassa la tête à force de chercher la raison d’une pareille rigueur. Mais tout allait uniment au Chenal du Moine. Depuis Pâques, Venant n’avait pas bu pour la peine. À le voir assidu auprès d’Angélina et serviable à David Desmarais, on se disait qu’avant longtemps le voisin aurait un maître gendre. Angélina apportait aux fleurs et à la maison des soins encore plus tendres. Quand elle disait « ma maison, mes fleurs », on eût dit les mots réchauffés près de son cœur, tellement ils étaient à la fois doux et chauds à entendre.

Chez les Beauchemin, le poulailler, par les soins du Survenant, rapportait plus que jamais à semblable époque.

— Et si j’suis encore en vie, l’année prochaine, disait-il en s’ambitionnant à le faire produire davantage, vous aurez des poules qui pondront en hiver.

L’invraisemblance du projet fit sourire Amable. Venant continua quand même à exposer ses plans.

— On pourrait semer du trèfle dans la vieille prairie. En amendant la terre, comme de raison. Le « Journal d’Agriculture » dit qu’avec de la chaux mêlée dedans, on peut faire des merveilles. Et pourquoi pas avoir un carré de fraisiers ? Les deux