Page:Guèvremont - Le survenant, 1945.djvu/158

Cette page a été validée par deux contributeurs.
159
LE SURVENANT

À la première lueur du jour, Didace et le Survenant appareillèrent. Ils avaient près de quarante pièges à poser, puis à marquer d’une palette de cèdre.

— Passe-moi la ferrée, ordonna Didace.

Didace, armé de la pelle, se mit à creuser partout où il y avait trace de rats, sur le bord de l’eau, dans les buttes ou au creux des souches. Le Survenant l’aida à lever la tourbe et à faire des trous pour y placer le piège et le masquer après. De son côté, Z’Yeux-ronds chassait. Il suivait les pistes, déterrait les ouaches et courait s’embusquer à la sortie pour attendre le gibier.

Leur besogne terminée, les deux hommes soufflèrent. Ils avaient les mains crevassées et en sang. Le Survenant tira de la poche de son mackinaw un flacon de gin et demanda à Didace :

— Vous prendriez ben une gobe de fort pour vous regaillardir ?

— Je prends rien, protesta hautement Didace comme si pareille offre fût de nature à l’offenser.

Cette fois, il se demanda où le Survenant pouvait ainsi se procurer de quoi boire et se dit : « Je m’en mêle plus. Je m’en mêlerai plus jamais ! » Même l’insistance du Survenant ne le fit pas céder :

— Essaye pas, Survenant, tu perds ton temps. Je me suis acarêmé après l’autre soir que tu sais, je