ajouter une bûche résineuse à la braise mourante. Ainsi elle serait moins isolée ; le crépitement du feu lui tiendrait compagnie. Mais de nouveau elle se désola. Aussi vrai que si elle eût été l’unique tributaire de la fatalité, Alphonsine agonisa comme seule et abandonnée sur une vaste terre d’injustice. Elle était la pierre des champs, froide et stérile, parmi les avoines ardentes et soleilleuses. Elle était le grain noir qu’une main dédaigneuse rejette loin du crible. Et elle en avait tant de peine, et elle sanglotait si fort qu’elle dut comprimer à deux mains les battements de son cœur afin qu’il n’éclatât pas de douleur. Elle pleura toutes ses larmes jusqu’à ce qu’elle s’assoupît, la tête enfouie au creux de son bras. Mais à tout moment des soubresauts secouaient ses maigres épaules.
À dix heures elle s’éveilla, toute frileuse et engourdie. Venant dormait dur et Didace n’était pas de retour. Au dehors une tempête de neige succédait à la pluie.
— C’est du sucre qui tombe, se dit Alphonsine, en pensant à Amable, à la sucrerie.
Les chemins deviendraient impassables. Après avoir abaissé la mèche, elle prit la lampe avec précaution et la déposa dans un plat de faïence sur le chiffonnier, à un angle de la chambre. Pour ne pas s’endormir d’un sommeil trop profond, elle s’allon-