— Pense pas ça, Énervale, je te le défends. Comme si je savais pas que je suis décharnée.
Énervale conclut tristement :
— On est des vieillardes, nous deux.
Il y avait quelque chose de changé en elles. Déjà aux petits soins l’une pour l’autre, les Demoiselles Mondor trouveraient dans la haine du même homme la raison d’une amitié durable :
— Mange donc, Énervale, tu vas perdre toutes tes forces.
— J’ai pas plus faim que la rivière a soif. Je t’en prie, marche pas tant, Ombéline, toi qui as les pieds sensibles.
Sur le soir l’homme revint, heureux et accablé. Avant même qu’il eut saisi la pompe pour boire à même, les Demoiselles, d’un signe, lui montrèrent l’argent de ses gages, sur le coin de la table. Ombéline, les yeux baissés, de nouveau renfrognée, lui dit sèchement :
— Le temps des récoltes est fini. À c’t’heure on n’aura pas besoin de vous.