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En Pleine Terre

Mais ils n’ont guère le temps de converser. Deux hommes aux rames, l’un à l’aviron, ils courent d’abord les éclaircies de plus en plus rares parmi les glaces qui cernent le bateau pêcheur. Ils dérivent parfois à un arpent de leur course et patiemment s’engagent de nouveau vers leur but. La chaloupe affolée monte sur une banquise qu’ils calent avec soin ; ou elle enfonce presque « à fleurement d’eau ». Pour la troisième fois Ludger remonte dans la pince la morte qui a glissé à ses pieds. À chaque manœuvre les rames s’épaississent de glace. Deux heures durant, des masses au bout des bras, ils bataillent contre le vent, le froid, les glaces, sans un mot de reproche. Eh ! ho ! donc ! rame, Ludger ! pousse, Avelin ! tire, Joachim !

***

Requiescat in pace !

Maintenant que la vieille paysanne a échoué au dernier port, les hommes s’appareillent sans retard au retour périlleux. Dans une course au magasin voisin, Ludger a obtenu quelques douceurs pour les siens. Tous les trois se hâtent vers la chaloupe : un