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PASSAGE DE L’HOMME

elle ferma les yeux, et les rouvrit, mais un court temps et comme absente, puis elle mourut.

« Le prêtre cessa de chanter. Il alluma un grand cierge qui sentait une odeur d’encens. Le vent se leva. Je regardai la mer et je pensai : « Voilà que notre enfant est mort, et Claire elle-même, et ils attendent là-bas que je revienne des Iles ! où donc maintenant, prendrai-je la force d’y aller ? »

« Geneviève, je vais rester ici longtemps encore, à ne rien faire, à simplement attendre d’y voir mieux. Le grand malheur, et ce grand malheur de douter, pire que la mort, garde-les pour toi ? Ne les dis à personne du village. Et même si le vieillard revenait, tu sais, cet homme qui vint la nuit, un peu avant notre départ, dis-lui que je garde confiance ; il eût voulu me voir partir tout seul. Il me disait : « La recherche des Iles, il faut la faire avec une âme d’enfant : l’amour, la mort… » Il haussait les épaules. Je crus entendre que l’amour et la mort, la connaissance de l’amour et de la mort, faisaient les Iles plus difficiles à découvrir, les rendaient même, peut-être, à jamais impossibles. Pourtant, Geneviève, quand je suis parti avec Claire, — tu te rappelles, par ce matin — je croyais tant, porté par notre amour, que