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Français se battent des deux mains, à coups d’épée et à coups de pistolet, « l’épée dans la main droite et le couteau dans la gauche », nous dit Dollier de Casson. L’un des derniers, Dollard succombe, puis, après lui, les trois ou quatre autres survivants, gardant jusqu’à la fin, comme leur chef et comme tous les seize, l’héroïque serment de ne pas demander quartier.

Vous savez le reste. Le combat fini, les Iroquois comptent leurs morts. Et c’est pour eux une stupéfaction. Épouvantés ils se disent, ainsi l’ont rapporté les Hurons déserteurs : « Si dix-sept Français n’ayant pour toute défense qu’un misérable réduit qu’ils ont trouvé là, par hasard, ont tué un si grand nombre de nos guerriers, comment serions-nous donc traités par eux, si nous allions les attaquer, dans des maisons de pierre, disposées pour se défendre, et où des hommes de pareil courage se seraient réunis ? Ce serait folie à nous ; nous y péririons tous. Retirons-nous donc, et reprenons le chemin de nos bourgades. »

La colonie était sauvée. À Québec on s’étonnait. On se demandait ce qu’était devenue l’armée des envahisseurs. Pendant ce temps-là, sur les rives de l’Outaouais sauvage, le vent dispersait les cendres des sauveurs et le Long-Sault mêlait à la voix de ses cataractes une rumeur d’épopée :

« Il faut donner la gloire, dira bientôt la Relation, à ces dix-sept Français de Montréal, et honorer leurs cendres d’une éloge qui leur est due avec justice… Tout était perdu s’ils n’eussent péri, et leur malheur a sauvé le pays… »