Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/7

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le patriotisme des jeunes



Le patriotisme des jeunes ne diffère point du patriotisme des autres par le fond des choses. Il se fonde, lui aussi, sur l’amour du pays et la fidélité aux morts. S’il admet quelque élément nouveau, ce ne peut être qu’une manière de servir qui s’adapte au temps, avec une ferveur plus chaude dans le dévouement.

La jeunesse qui fut sévère pour ses devanciers, a perdu le droit de recommencer leurs fautes. La lutte contre l’ennemi de l’extérieur a peut-être trop hypnotisé nos pères. Que dans un corps-à-corps en champ clos, l’adversaire fût l’unique obsession, chacun le comprend. Mais cet adversaire lui-même, nous avons mieux repoussé ses coups bruyants, ses brutalités, que ses ruses enveloppantes et le sortilège de sa force. Aujourd’hui, après ce long combat qui dure depuis cent soixante-quinze ans, nous n’avons pas perdu de batailles décisives ; mais notre âme de combattant n’a plus sa belle santé française.

S’il est une leçon que doit retenir la jeunesse, c’est que la survivance d’un peuple se conquiert beaucoup moins par les beaux coups d’éclat, par les victoires d’éloquence, que par les œuvres constructives. Être fort pour un peuple, c’est l’être d’abord par la vigueur intérieure de son âme, par sa constitution sociale, économique, intellectuelle, morale. Cela même est la première condition de la défense contre l’ennemi extérieur ; pour être un bon soldat il faut être physiquement et moralement bien constitué.