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L’Ancêtre

fants, la petite troupe de colons décide d’engager la bataille. Ils veulent, ces braves, défendre leurs familles, mais aussi, sans nul doute, arrêter les barbares sur la route de Québec. En ce temps-là tous voulaient servir, chacun se faisant, à son poste, le volontaire de la Nouvelle-France. Sans perdre une minute, Colombet et les autres se portent sur le bord de la grève et tirent les premiers coups. Quatre canots ennemis chavirent dans le courant. Surpris, les Iroquois poussent vers la rive et mettent pied à terre. Alors un combat furieux s’engage, corps à corps, sous le bois, le long de la coulée. Colombet essaie, mais en vain, de rallier ses hommes vers le fort. Les Français se battent en héros. Trente ennemis sont abattus ; le reste prend la fuite. Les nôtres perdent quinze hommes dont cinq prisonniers, parmi lesquels Jean Grou. Le soir même, par peur des Iroquois, disent les vieux registres de la Pointe-aux-Trembles, l’on enterra sur place, près de la coulée de Jean Grou, les corps des Français tués. Quelques jours plus tard, en présence du Père Millet, Jean Grou et quatre de ses compagnons étaient brûlés chez les Onneyouts.

Découragés comme toujours par la lourde défaite, les Iroquois avaient repris, dès le lendemain, la route de leurs cantons, renonçant à leur jonction avec les Bostonnais. Et les humbles volontaires de Colombet recueillaient cette gloire d’avoir préparé peut-être, contre Phipps, la victoire de Frontenac. Un de nos historiens, M. E.-Z. Massicotte, a voulu remettre en lumière le geste de ces héros oubliés. Il a même souhaité qu’un jour, sur le lieu consacré, s’élève un monument à la gloire de ces modestes combattants, émules de Dollard.