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Notre Maître, Le Passé

pour vivre. « Nuit et jour, nous disent les « Annales de l’Hôtel-Dieu », ces dignes fondatrices de la Congrégation étaient occupées à coudre, à couper des vêtements pour les femmes aussi bien que pour les sauvages, sans compter le travail de l’école ». Parfois il y a même, dans leur vie, des actes, des élans d’un enthousiasme audacieux, qui se défendent à peine des couleurs de la légende. Ainsi arrivera-t-il, pendant les jours où tout Ville-Marie, remué comme aux âges de foi, entreprendra la construction de Notre-Dame de Bon-Secours. Le soir, après leurs classes, on voit passer les Sœurs, Marguerite à leur tête, qui s’en vont, allègres, vers le chantier, servir les maçons et réchauffer l’entrain général.

De pareils traits font mieux que compléter ce tableau de vaillance féminine ; ils révèlent le grand air qu’on devait respirer dans les écoles de la Nouvelle-France et ce qu’autour de leurs murs elles devaient exhaler. Nous devinons, en tout cas, de quels ferments les âmes des enfants devaient être soulevées par ces mains de femmes qui avaient remué des pierres et du mortier d’église, qui gagnaient fièrement leur vie, comme aux temps apostoliques. S’il y eut, dans notre jeune histoire, la beauté de cette heure où toutes les âmes se tinrent dans l’intimité de l’héroïsme, où, sous les fronts, s’entretenait l’habitude des résolutions suprêmes, la colonie le dut beaucoup, n’en doutons pas, à ces humbles maisons, foyers, écoles de vaillance où le labeur quotidien, au-dessus des forces, fut toujours accueilli, sans une plainte, sans une lassitude, par des âmes sereines, magnifiquement tenues.

Il faut l’ajouter : si Marguerite et ses filles font voir cette belle santé morale, c’est qu’elles respirent en plein surnaturel. Nous allons voir