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Pour qu’on écrive l’histoire



C’est le magistère de l’histoire, incessante transfusion de l’âme des pères dans l’âme des fils, qui maintient une race invariable en son fond. Pour des petits peuples comme le nôtre, mal assurés de leur destin, exposés à douter de leur avenir, c’est l’histoire, « conscience vigilante et collective d’une société fière d’elle-même, » (G. Kurth), qui détermine les suprêmes fidélités. Pour une race démembrée et dispersée comme la race française d’Amérique, c’est encore l’histoire, reliant aux mêmes souvenirs, faisant communier à l’idéal des mêmes aïeux, qui maintient, malgré les distances, l’essentielle fraternité.

Ce grand moyen d’union et de conservation nationale, cette école de fierté trop négligée par notre ignorance, aidons-nous, tous ensemble, à lui restituer la plénitude de son rôle. Dans cette Amérique où nous sommes la plus vieille race et où ce titre doit compter pour quelque chose, qu’attendons-nous, les uns et les autres, pour le faire savoir à ceux-là qui n’ont pas toujours le temps ni la volonté de l’apprendre ? À nous, du Canada français, héritiers, continuateurs de la Nouvelle-France, à nous d’écrire plus particulièrement l’histoire générale de toute la race. Mais à chacun des groupes français qui, là même où se déploie leur destin, ont besoin de trouver des raisons de fierté, des arguments de défense qui leur sont propres, à eux de recueillir le témoignage de leur grandeur et de leur droit. Mistral jetait un jour à sa patrie provençale cet appel