Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/253

Cette page a été validée par deux contributeurs.
253
Conclusion

au cœur du continent ne fut pas seulement une merveilleuse aventure commerciale et militaire ; ce fut en même temps, une irrésistible poussée de l’apostolat catholique. Rarement les explorateurs dépassent les missionnaires. Quand Champlain touche au pays des Hurons en 1616, les Récollets l’y ont précédé ; quand de Saint-Simon s’en va vers la baie d’Hudson, le Jésuite Albanel l’accompagne ; Marquette est de la flottille qui avironne vers le Mississipi ; Cavelier de la Salle mène toujours avec lui des religieux et des prêtres ; et le Père Mesaiger puis le Père Aulneau sont de l’expédition des La Vérendrye.

Mais voici qui vaut mieux encore : l’évangélisation des indigènes n’est pas seulement l’affaire des missionnaires ; c’est une œuvre collective à laquelle tout le jeune peuple s’associe. Ville-Marie est fondée pour être à la fois un bastion de la colonie et un séminaire d’apôtres. Aux associés de la Sainte-Famille, François de Laval propose de « servir à la conversion des infidèles de ce pays, par l’exemple d’une vie irréprochable ». À partir de l’année 1636 ce vœu se propage, parmi les colons de Québec, de communier douze mois de suite, de dire autant de fois le chapelet, de jeûner la veille de l’Immaculée-Conception pour obtenir « la conservation de ce pays et la conversion des pauvres sauvages qui l’habitent ». Oui, telle était bien l’atmosphère des âmes. Et si « la prière de chaque nation », comme l’a écrit le comte de Maistre, « indique l’état moral de cette nation, » quelle grandeur l’Église n’avait-elle pas déposée dans l’âme de nos pères !

Viennent maintenant les jours mauvais ! Les noblesses de son histoire, tous ses grands souvenirs deviendront des énergies morales pour notre