Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/243

Cette page a été validée par deux contributeurs.
243
Les femmes dans notre histoire

tuaire derrière sa grille, se consuma lentement pour la patrie.

Plus tard encore, lorsque les dernières défaites eurent abattu les drapeaux des régiments de France, lorsque le conquérant s’installa en maître dans ce pays, et que ce fut, pour nos pères, une angoisse de savoir si leur race n’allait pas mourir ; lorsque, dans la désespérance trop grande, les abdications commencèrent à se multiplier, la race fit encore signe aux héroïnes d’hier. Alors il se trouva des demoiselles de chez nous pour être fières de leur sang et de leur foi plus que de toute chose. Et leur résistance s’incarna dans cette idéale Blanche d’Haberville qui refusa d’être « la première à donner l’exemple d’un double joug aux nobles filles du Canada ».

Quand, séparés depuis longtemps de la France et ne recevant plus de là-bas les renforts religieux de jadis, il fallut trouver chez nous des héroïsmes de femme pour continuer les ministères de la charité et de l’éducation, nos évêques firent signe aux filles du Canada français. Et sur tous les points du pays, ce fut une poussée soudaine de couvents, d’hospices, d’asiles, de monastères qui croissaient plus drus et plus forts que les blés de la terre canadienne.

Quand notre jeune race, redevenue assez vigoureuse pour sortir d’elle-même, se ressouvint de l’apostolat de la Nouvelle-France ; quand nos missionnaires s’en allèrent vers le lointain nord-ouest, retrouver les traces des fils de Loyola, ils appelèrent à leur suite, jusque dans les régions glacées, les petites religieuses du Québec. Et dans le canot qui, en 1845, emportait vers la Rivière-Rouge le Père Aubert et le Frère Taché, avaient pris place deux Sœurs Grises de Montréal qui s’en al-