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Ce Cinquantenaire

tout pour être une force au service de ces droits, qui ne voit que les unions fédératives trouvent, dans ce respect de leur fin, leur premier ciment moral ?

Les hommes d’État canadiens ont-ils eu l’intelligence de cette situation ? La grande politique, chez nous, s’est-elle interdit les intérims ? Chacun a pu lire, à l’occasion de ce cinquantenaire, le message du premier ministre au peuple du Canada. On y exalte les développements matériels du pays. On s’est bien gardé de célébrer, sur le même ton, les progrès de l’âme commune et de l’unité nationale. Le ministre eût été bien empêché de dire ce qui n’a pas été fait, depuis ce demi-siècle, contre l’âme du pays et l’unité de la nation canadienne. Au lieu de s’en remettre aux plus vieux habitants du Canada, de forger le pays, et de fortifier par eux l’âme nationale, nos chefs d’État ont jugé plus pratique de laisser envahir la maison par des hordes d’étrangers. Ils ont ouvert le pays à une immigration absolument disproportionnée avec notre pouvoir d’assimilation. Les portes se sont ouvertes de préférence aux Américains et aux Anglais des îles britanniques, les deux classes d’immigrants les plus propres, en ce moment, à ruiner le patriotisme canadien. Trop proches du Canada, changeant de pays sans changer d’allégeance, les premiers deviennent fatalement les agents les plus actifs de la pénétration américaine ; les seconds, toujours hypnotisés par la métropole, subordonnent autant qu’ils peuvent leur pays d’adoption à leur pays d’origine. Du reste, ces immigrants tombaient parmi nous à l’heure précise où une rupture violente avec notre tradition politique portait un coup mortel à l’esprit national. Au lieu de développer la personnalité de