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l’on a le cœur froid sur ce que nous devons d’amour et de respect pour les sacrifices et les œuvres des ancêtres. Si nous n’aimons pas ce qu’ils nous ont légué, nous méritons d’être bien vite oubliés après notre rapide passage sur la terre où ils ont élevé des monuments qu’ils croyaient durables, mais que nous aurons aidé à démolir. » Jusqu’ici tout est bien. Mais cet hommage une fois rendu au souvenir des aïeux, voici réapparaître l’idéologie déplorable : « Il se forme, continue Papineau, une nouvelle et grande Nationalité, mais elle n’est pas celle du Massachusetts, du Connecticut, du Vermont, de la Delaware, etc., etc. ; et prêcher la petite nationalité néo-canadienne c’est repousser l’annexion qui est aussi certaine que désirable et où doit se former une Nationalité Colombienne, car c’est au génie superéminent de celui-là qu’il a été donné de préparer le berceau où devaient croître et les vertus de Washington et le génie de l’auteur de la déclaration de l’Indépendance, non des treize colonies seulement, mais de l’humanité entière. Il révélait les droits politiques communs à l’homme de toute race et de toute couleur… »

Si ces lignes ont quelque sens,[1] il semblerait donc que Papineau inclina pour l’annexion du Canada aux États-Unis, non seulement par admiration idolâtrique de la liberté et de la Constitution de nos voisins, mais aussi par mépris du projet de confédération canadienne alors en train d’agiter l’opinion. Entre les deux fédérations de peuples il se ralliait à l’américaine, qui lui paraissait d’une inspiration politique plus haute et la loi inéluctable de l’avenir.

  1. Nous disons : « Si ces lignes ont quelque sens, » car Louis-Joseph Papineau n’est pas toujours maître de sa langue et il arrive, ainsi qu’on vient de le voir, que sa phrase se défend mal du rébus.