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finitifs. Il faudrait même regarder plus haut et plus loin. Les historiens signalent volontiers l’influence des évolutions diverses de la politique métropolitaine sur le développement des libertés coloniales ; peut-être serait-il non moins expédient de mesurer la répercussion des agitations coloniales sur ces mêmes évolutions de la métropole. Quand ce compte rigoureux sera fait, alors mais alors seulement, on pourra retrancher, si l’on veut, de la vie de Louis-Joseph Papineau, ses trente dernières années ; il lui en restera encore assez pour demeurer grand homme.

Certes, les dernières périodes de la vie du tribun nous offrent des perspectives beaucoup moins consolantes. Que d’obscurités toutefois enveloppent encore les deux époques de la rébellion et de l’union des deux Canadas ! Pour notre part nous croyons que l’histoire prochaine, plus calme, mieux informée sur les événements de 37-38, réserve aux hommes de cette génération, des indulgences insoupçonnées. Quand elle fera le partage des responsabilités, Louis-Joseph Papineau échappera difficilement à quelque blâme. Trop longtemps le chef des patriotes mania, devant les foules, des explosifs dont il ne pouvait ignorer le danger. Avouons même que la prudence ou la prévoyance ne furent pas ses qualités dominantes. Il fut moins un directeur qu’un excitateur d’action frémissante. Mais avant de porter un jugement définitif, l’histoire impartiale aura le devoir d’interroger les deux parties. Elle devra démêler la complexité politique où Papineau et ses partisans jouèrent leur existence. Elle devra reconstituer la longue série des humiliations et des vexations infligées à ces hommes, la provocation érigée en système, l’agitation populaire maintenue à l’état chronique