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Notre Maître, Le Passé

sure que s’affirmera leur nombre et leur volonté de survivre, les Acadiens apprendront à quelles fins la Providence de Dieu leur a préparé ce capital d’héroïsme. En attendant qu’ils ne renoncent pas à rentrer tout de bon dans la vieille patrie de 1755 ! Dans quelques jours, ô Grand Prée, tu entendras les rumeurs du grand pèlerinage. Ô terre de la légende, parle bien à tes fils, aux déshérités qui reviendront errer dans les champs de leurs pères ; parle-leur du passé, des ancêtres qui dorment maintenant ignorés ; parle-leur de la race, de la langue qu’il ne faut pas oublier, de la revanche légitime qu’il faut préparer toujours et sans cesse. Puis invite-les à reprendre la route de tes landes, à conquérir pouce par pouce la terre qui les amènera jusqu’à toi. Car, vois-tu, ô pays acadien, des harmonies préétablies existent entre le sol et la race ; et tes prés si calmes et si doux, tes vallées si paisibles et si pieuses, tes collines qui appellent encore des croix d’églises, tes grands horizons aux lignes lumineuses, tout cela c’est la patrie naturelle d’une race française et catholique, au génie harmonieux et clair, prédestinée à toutes les hautes formes de l’idéal.

30 mai 1917.