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Notre Maître, Le Passé

avertir ? Je ne prétends point m’arrêter à des cas d’exception dont n’a pas à s’occuper une synthèse d’histoire. Et si, par conséquent, les ombres paraissent rares au tableau, ce n’est point que les ombres n’existent pas ni que j’en ignore l’existence ; c’est qu’il n’en va pas en histoire comme en peinture : la part des ombres n’est pas réglée par un principe d’art, mais par la loi de la vérité.


I


L’un des fondateurs de la race, le premier évêque de la Nouvelle-France voulut que le fleuve de vie jaillît chez nous d’une source sanctifiée. Se sentant le père spirituel de tout un peuple, il s’appliqua à pénétrer d’esprit religieux les familles souches de ce pays. Dès le début, avec sa hardiesse de grand apôtre, complétant l’œuvre des jésuites, il plaça devant les yeux de nos ancêtres, comme idéal à réaliser, la famille de miracle instituée par Dieu le Père à la convenance de son Fils : la sublime famille de Nazareth. Par un mandement de l’année 1665, François de Laval établissait la confrérie de la Sainte-Famille. Il la destinait principalement aux femmes mariées ; mais, notez l’esprit du temps : il y admettait aussi facilement les jeunes filles. Et voici à l’un des chapitres des règlements, les vertus que l’on proposait aux associées :

1o — « Envers Dieu », la crainte de l’offenser, la promptitude dans les choses où il va de son honneur et de son service ; une grande soumission et conformité à ses volontés dans les accidents les plus fâcheux ; un profond respect pour toutes les choses saintes. »

2o — « Envers le mari, » un amour sincère et cordial, qui fasse qu’on ait un grand soin de tout ce qui le regarde selon le temporel et le spirituel ;