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septième volume 1940-1950

aiment les femmes qui se garçonnisent ?… Restez femmes. Mais soyez-le. Françaises et catholiques, vous n’avez besoin de rien d’autre pour devenir des « entraîneuses », car vous savez bien que le jour où vous en aurez recréé la mode, rien ne sera plus chic que d’être Canadien français.

Heureuses années où une jeunesse de tête solide, non dévoyée par les pseudo-intellectuels, pouvait encore entendre le langage du bon sens et de la raison ! Cependant une lettre d’Antonio Perrault, accusé de réception de Paroles à des étudiants et de Notre mission française, assombrit quelque peu mon trop vif contentement. Selon mon ami, le désaccord, la confusion des idées, l’absence même de pensée sont par trop répandus et déjà, dans nos milieux de jeunesse et nos milieux professionnels. Triste état d’âme d’un peuple qui ne possédait alors ni vrais chefs politiques, ni vrais chefs nationaux. Du moins nul chef prestigieux. Pouvais-je quand même nourrir l’illusion d’avoir atteint, touché une partie importante de la jeunesse ? Quelques échos dans la presse, ma correspondance de ce temps-là m’incitent à le croire. André Laurendeau, qui écrit alors des « Lettres de Montréal » à L’Action catholique de Québec, finit une de ses lettres (10 janvier 1942) par ces mots : « Ceux qui veulent se donner amoureusement à la vie dure, rude, joyeuse, chaude, pleine, ceux-là trouveront, dans Paroles à des étudiants, le bréviaire quotidien, la mystique inspiratrice. »