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mes mémoires
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Groulx me disent : « L’Archevêque sort d’ici ; il est d’une nervosité incroyable. Il nous a fait cette confidence : “Vous ne sauriez croire combien j’ai dû subir, de la part du Saint-Père, des interrogatoires fatigants.” — »

Le 2 janvier 1950, l’Archevêque de Montréal est mandé à la Délégation apostolique à Ottawa. Mgr Antoniutti le met au courant de la sentence de Rome : déposition de son siège d’archevêque et ordre de quitter Montréal dès les derniers jours de janvier.

— Je prends tout de suite l’avion et je pars pour Rome, de répondre le malheureux condamné.

— Inutile, lui réplique le Délégué. Vous connaissez trop votre droit canonique pour ignorer qu’il s’agit là d’une sentence sans appel. D’ailleurs vous ne serez point reçu à Rome. Partez plutôt en vacances ; vous avez le droit de vous dire fatigué. Allez vous reposer. Prolongez votre repos ; puis donnez votre démission. Et tout passera inaperçu.

L’Archevêque refuse carrément cette solution. On m’a raconté dans le temps — le fait est-il authentique ? — qu’il aurait député son auxiliaire, Mgr Whelan, à New York, auprès du cardinal Spellman, puis à Toronto auprès du cardinal McGuigan. Les deux cardinaux se seraient formellement récusés, affirmant l’un et l’autre : « Il n’y a rien à faire. » L’Archevêque rentre à Montréal, fermé, replié hermétiquement sur lui-même, selon son habitude. Personne de son entourage n’a le moindre soupçon du drame affreux qui le torture. Le premier à recevoir sa confidence sera un laïc, le maire de Montréal, Camillien Houde. Le 9 janvier, l’Archevêque sollicite je ne sais quelle faveur de M. le Maire, lui disant : « Vous ne me la refuserez pas, parce que c’est la dernière