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septième volume 1940-1950

finiront par retomber dans les ornières du régime précédent : des Caronneries. Mais il me paraît qu’il y aura dans notre organisation coopérative de l’avenir ce que nous y mettrons.

Voilà pourquoi je vais de l’avant et y lance mes curés superbes types, je t’assure, et qui connaissent le tabac. Il y a un magnifique entrain dans le bas du fleuve. Mes agronomes sont enchantés que nous prenions les devants. Ils respirent, Caron parti. Et ils nous supplient de marcher afin de constituer des précédents qui les libèrent à l’avance des lisières d’un autre ministre moins intelligent.

Celui-ci veut notre concours et se recule de nos jambes en tout ce qui est œuvre d’éducation post-scolaire… parce que tous ses agronomes lui ont dit qu’il était inutile de parler d’organiser la classe agricole si les curés ne sont pas avec les techniciens pour les accréditer et pour rallier les cultivateurs.

Que n’a point fait l’évêque Courchesne pour sa chère classe d’agriculteurs ? Il adressera un mémoire au cardinal Villeneuve pour supplier l’épiscopat québécois d’intervenir dans la solution du problème agricole qu’il estime capital. Dans ce mémoire, il en revient à son idée d’une association professionnelle des agriculteurs. Il voudrait qu’on fît examiner « par quelqu’un de compétent la question de la coopérative fédérée. J’ai toujours cru, écrira-t-il, que cet organisme, même mal né, devrait devenir l’organisme coopératif central de l’association professionnelle libre. » C’est le même évêque qui, dans un congrès d’agriculteurs, leur clamera ce mot d’ordre resté célèbre : « Mêlez-vous de vos affaires, mais mêlez-vous-en ! » Et dire qu’aujourd’hui il y a des braillards pour soutenir que les évêques d’autrefois n’ont pas fait appel à l’action laïque, ni ne se sont occupés des intérêts matériels ou sociaux de leur peuple !

Après son départ pour Rimouski, nous nous voyons moins souvent. Notre correspondance se fait un peu plus rare ; mais il m’invite à prêcher deux retraites chez lui : l’une à ses prêtres du Séminaire ; l’autre à ses ordinands. Et nous continuons à nous consulter sur quelques problèmes qui l’inquiètent autant que moi. En 1935, il me fait part de ses craintes au sujet de l’orientation