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mes mémoires

En vérité cependant, et je le dis dans toute la sincérité de mon âme, je ne me suis jamais senti si heureux qu’aux rares, trop rares moments de ma vie où l’occasion me fut fournie d’aborder directement le problème religieux, de parler du Bon Dieu, de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de l’Église. Quelques invitations viennent au-devant de mes désirs. J’écris des articles, je prononce des sermons ou conférences ; je prêche quelques retraites. Cette dernière forme de prédication m’enchante : trois jours, huit jours passés à ne prononcer que la parole de Dieu, à ne vivre qu’en pleine atmosphère surnaturelle. Sur la fin de ma vie, souvent ai-je souhaité que, ma carrière achevée à l’Université, je me donnerais enfin à cette forme d’action ; je rachèterais tant d’efforts perdus, tant de pas courus en dehors de la voie sacerdotale. Hélas, le Bon Dieu l’entendait autrement. Des accidents de santé trop vite redoublés m’enlevèrent les moyens et les forces d’un tel ministère.

Articles de caractère religieux

Parmi les écrits ou articles de caractère religieux que je retrouve en cette période de 1940-1950, il en est un du Quartier latin, journal des étudiants de l’Université de Montréal, qui paraît être de l’année 1940. Le croira-t-on ? On m’avait proposé ce sujet : Catholicisme, principe d’avant-garde. Eh oui ! dans ce temps-là, l’on était catholique à l’Université de Montréal, même chez les étudiants. Je citerai quelques parties de cet écrit pour l’accent de modernité qu’à mon sens il a gardé. Pouvais-je d’abord ne pas louer les jeunes gens qui m’avaient assigné tel sujet ?

Je ne chicanerai pas le Quartier Latin pour ce titre d’article qu’il me propose. Voici des étudiants qui n’acceptent point de rapetisser leur catholicisme. En face du monde d’idées et de réalités si considérables et si vivantes qu’étiquette le nationalisme, ils refusent de n’assigner à leur foi, à leur doctrine religieuse, qu’un rôle négatif : celui d’un garde-fou ou celui d’une sentinelle au « Garde à vous ! »

Après ce début, j’en viens à dénoncer une forme d’éducation, forme malheureuse et par trop « négativiste » qui enseigne plutôt à ne pas faire ceci ou cela qu’à faire ceci et cela. Forme d’éducation qui s’allie par trop naturellement à une école d’autres « négativistes » qui, sous prétexte d’épurer notre catholicisme, le vou-