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recours, une fois de plus, à mon ami Antonio Perrault. Son prestige de grand avocat impressionnerait, j’en étais certain, les bonzes récalcitrants de la Montagne. Perrault se met en campagne avec toute la ferveur de son amitié ; il voit le Chancelier, les gouverneurs de l’Université. Il emporte le morceau. On me consent une pension de $2,000. par année. Dans l’intervalle, pour m’amadouer un peu, sans doute, je l’ai écrit plus haut, le Conseil de la Faculté des lettres m’avait décerné le titre de « professeur émérite » de la Faculté, et avait donné mon nom à la chaire d’histoire du Canada. Le 6 décembre 1949, le recteur, Mgr Olivier Maurault, toujours gentilhomme, s’emploie à me faire oublier ces derniers désagréments. Il m’écrit :

Cher monsieur le Chanoine,

Je vous souhaite une bonne, heureuse et sainte année 1950.

Celle qui s’achève aura été bien mêlée de joies et de peines, au moins pour moi. Votre démission en particulier m’a été pénible.

Je ne vois jamais, d’une âme égale, partir de la maison des hommes qui s’y sont dévoués de longues années et qui en ont fait l’honneur. Quelle qu’ait été l’attitude de l’Administration à un certain moment, vous ne pouvez ignorer que l’Université — ce qui s’appelle l’Université — vous portait la plus haute estime et s’afflige profondément de la lourde perte qu’elle fait en vous perdant. Vous étiez — permettez-moi cette expression — une de nos vedettes, et je ne me faisais pas faute de le dire, lorsque j’avais l’occasion de parler de l’Université en dehors de Montréal. Vous avez fondé et illustré votre chaire d’Histoire du Canada. Personne ne vous contestera ce mérite. De plus, vous avez voulu pourvoir à votre succession, donnant ainsi un exemple salutaire à notre communauté universitaire.

Pour ce dernier service, comme pour ceux que vous nous avez prodigués depuis de si longues années, je vous prie d’agréer l’expression de ma fraternelle gratitude et de celle de toute l’Université.

Malgré les griefs que vous pouvez avoir contre certains membres de l’Université, qui n’ont pas toujours compris la portée de votre œuvre, j’espère que vous ne garderez pas un trop mauvais souvenir de l’Institution que vous venez de quitter.