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partie de ses fonctions ministérielles. Je n’ai rien à attendre de M. Perrier, libéral à tous crins, ennemi violent de tout ce qui peut sentir le nationalisme. D’autre part, M. Perrier doit quelque reconnaissance à M. Groulx qui lui a cédé une partie de ses fonctions. J’interviens une fois de plus auprès de M. Groulx. Et Guy Frégault peut partir pour les Archives de Québec. Il y ébauchera, si même il n’y achève, son deuxième ouvrage : La Civilisation de la Nouvelle-France. Dans l’intervalle, je lui ai passé mes cours publics. Malheureusement nous ne sommes plus sur la rue Saint-Denis. L’Université de la Montagne est pratiquement inaccessible, surtout le soir. L’auditoire du jeune historien se révèle plutôt maigre. Il laisse tomber ces cours publics. Mais à son retour de Québec, après deux ans, j’obtiens qu’il entre à l’Université en 1943-1944, à titre de chargé de cours d’histoire du Canada. En 1948, Maurice Séguin, l’un de mes étudiants, soutient sa thèse de doctorat en histoire. Pour lui faire une place à la Faculté des lettres, je décide de m’en aller.

Prudent, je ne donne point de démission ; j’autorise tout au plus Guy Frégault à m’obtenir, par l’intermédiaire de la Faculté des lettres, une pension. Il s’agit pour moi de rester en état de vivre, de garder ma maison, près de mes archives et de ma bibliothèque. Mon ferme dessein est bien de continuer mes travaux d’histoire, et en particulier, de mettre au point nombre d’études que, faute de temps, je n’ai pu achever. Après trente-quatre ans d’enseignement, sans rien d’autre qu’un salaire dérisoire, et après 1927, à peine suffisant, l’Université, en honnête institution, me semble-t-il, n’estimera point ma supplique inacceptable. Hélas ! pourquoi a-t-il fallu que mon départ s’accompagnât de beaucoup d’amertume ? Au Conseil de la Faculté des lettres, à l’administration, on s’accroche à toutes sortes d’arguties ; on oublie mes vingt-cinq ans d’harassants cours publics que je n’abandonnai qu’en 1940 ; on nie mes droits ou ma qualité de professeur « à plein temps », pour ne me servir qu’une petite pension risible de $75.00 par mois. Les choses s’embrouillent si bien qu’à la fin, le recteur Mgr Olivier Maurault, et le Chancelier me proposent tout bonnement de reprendre mes cours. Proposition qui me paraît si opportuniste que, de Vaudreuil, le 13 août 1949, j’écris une lettre d’un ton plutôt sec à mon Recteur, brave homme, resté l’un de mes