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mes mémoires 1940-1950

puis quelques documents inédits ; une bibliographie sur divers sujets d’histoire, à l’usage particulier des étudiants ; une « revue des livres et des revues », comptes rendus critiques pour renseignements sur la production historique, articles ou volumes, et en vue de relever le niveau de cette production ; enfin, pour susciter, autour de l’Institut et de ses œuvres, un certain esprit de famille, une chronique qui en relatera faits et gestes. L’exposé parut plaire au Comité de direction ; il ébranla même le scepticisme. Le président, du reste, n’abdique point toute prudence. Compte fait des historiens et des chercheurs de métier et aussi des institutions et amateurs d’histoire en Amérique française, et par-dessus tout du caractère de la revue, il ne croit pas établir à plus de 500 exemplaires le premier tirage.

Deux graves questions toutefois restent à résoudre : les abonnés et le financement de l’entreprise. Dans Le Devoir, M. Héroux, toujours diligent et généreux, fait à la Revue, comme à l’Institut, une publicité qu’on eût pu dire de grand orchestre : « La revue de l’Institut vaudra par les textes qu’elle publiera ; elle vaudra par l’élan nouveau qu’elle imprimera aux études historiques, par les liens qu’elle créera ou resserrera entre les chercheurs. »

« Elle portera au loin l’écho de la vie française de notre continent. On la trouvera sûrement dans la bibliothèque des grandes maisons d’étude du monde. Quelles curiosités, quelles recherches peut-être n’y suscitera-t-elle pas ! » C’était presque parler en prophète. Publicité éloquente, appels pressants qui nous vaudront, en quelques semaines, une avalanche d’abonnés. Si bien que le directeur prend peur. Ces abonnés ne cèdent-ils pas à quelque illusion ? Se rendent-ils bien compte du caractère de la Revue, de la forme d’histoire qu’elle leur réserve, forme quelque peu sévère, revêche ? D’un tirage de 500 exemplaires, il n’en faut pas moins passer au millier, puis bientôt dépasser ce millier, le porter à 1300, quand le président de la biscuiterie Stuart, M. Alfred Allard, nous paie, à lui seul, 100 abonnements destinés à ses principaux clients.

Reste la finance. Au soir de notre fondation, notre caisse ne connaît encore que le vide absolu. Pas le moindre sou. Nous