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septième volume 1940-1950

ficiels », et même, à ce qu’il semble, à quelque haut personnage du clergé. Le bruit s’était répandu d’une conscription possible des clercs dans l’armée. Le major général Laflèche que je tenais alors pour une nouille quintessenciée, s’était promené par les évêchés, se disant l’homme fort qui empêcherait cette conscriptions des clercs. Il aurait convaincu quelques naïfs. Quoi qu’il en soit, L’Action catholique, journal de Québec, ose recommander l’élection par « acclamation ». Léopold Richer lui riposte dans Le Devoir. Par quel hasard un journal d’Action catholique prend-il sur lui de s’immiscer dans une question politique ? Tout aussitôt Richer s’attire un monitum sévère du cardinal Villeneuve, dans sa Semaine religieuse. En ces jours-là, je reçois la visite du Père Paré, s.j., aumônier général de l’ACJC. Âme candide que ce cher Père qui s’essayait dans la diplomatie, laquelle n’était pas faite pour lui pas plus qu’il n’était fait pour elle. Le Père se dit l’envoyé du général Laflèche. Le ministre l’aurait chargé d’une mission auprès de moi. Et le général sollicite une entrevue. Que me veut-il ? Le Père me le laisse entrevoir. Il s’agirait de calmer, d’amadouer certains groupes de jeunesse et de les amener à se désister de toute opposition à la candidature du général dans Montréal-Outremont. Le bon Père me glisse même à l’oreille que mon intervention en l’affaire plairait fort à Son Éminence le Cardinal. Je commence à comprendre.

Catégoriquement je refuse l’entrevue. « Pas avant ni pendant l’élection, dis-je au Père. Après, peut-être ; mais je doute qu’alors le général y ressente le même intérêt. En outre, je vous prie de faire savoir à M. Laflèche que je n’ai rien d’agréable à lui dire. » Et je continue : « Je refuse l’entrevue parce que jamais — je l’ai dit assez de fois — je ne me laisserai prendre la phalange du petit doigt, dans quelque aventure électorale que ce soit. Je suis prêtre. Je reçois tout le monde. Je reçois même les hommes politiques qui me font l’honneur de me demander mon sentiment sur certains problèmes politiques. Je ne vais pas et je ne veux pas aller au-delà. Du reste, mon Père, à vous parler net, je ne vois guère en quoi la présence du général, dans le cabinet de M. King, peut nous être, à l’heure actuelle, de quelque service. Le général a la réputation bien établie d’un conscriptionniste. La rumeur publique, rumeur qui ressemble