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cinquième volume 1926-1931

testants. « Le pasteur, disaient ces malheureux, nous en donne plus que le curé. » C’était pendant le grand chômage. Des apostats de langue française, un ancien Cistercien, un ex-Oblat, adonné à l’ivrognerie, tenaient une « mitaine » sur la rue Sherbrooke, dans l’est, et vitupéraient contre le clergé, l’Église, la Vierge. La petite Canadienne de Lisieux croyait à des apostasies massives. Je dus la détromper. Apostasies trop nombreuses, sans doute, mais effets de l’ignorance et de la misère plus que de la malice. C’est à ce propos que Mgr Olivier Maurault, recteur de l’Université de Montréal, me rapportait un joli mot ou plutôt un triste mot recueilli sur les lèvres du grand vicaire de l’évêque anglican de Montréal. Mgr Maurault s’étant trouvé, dans un banquet, aux côtés du grand vicaire, s’était permis cette observation au sujet de nos apostats :

— Ne trouvez-vous pas un peu singulier, mon cher Monsieur, que des gentlemen de votre espèce, fournissiez des subsides à d’aussi tristes sires que l’apostat cistercien et l’autre, son compagnon ?

Le grand vicaire avait répondu :

— Ne vous en faites pas, Monseigneur ; c’est votre canaille qui s’en vient chez nous !