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sixième volume 1931-1939

pays, votre ambition est de vous développer dans le sens de vos innéités culturelles, d’être Anglais jusqu’aux moelles. C’est votre droit ; et, ce droit, vous avez assez de fierté pour le prendre sans le mendier. Et, certes, ce n’est pas moi qui refuserai de vous donner raison. D’autre part, aussi fiers de notre sang, de notre passé, de notre culture que vous l’êtes des vôtres, nous prétendons que notre droit est égal au vôtre. Nous voulons, nous aussi, nous développer dans le sens de nos innéités culturelles, être Français jusqu’aux moelles ; nous le voulons, ni pour des fins uniquement égoïstes ni par orgueil racique, mais pour apporter, comme vous, à notre pays, la modeste contribution de nos forces spirituelles, persuadés, comme vous, toujours, que pareil idéal de vie et pareille volonté ne constituent envers quiconque ni une provocation ni un défi. Et honni soit qui mal y pense ! »

Venaient enfin ces quelques ripostes aux résignés, aux découragés, aux défaitistes :

Le destin est élevé, dites-vous ? Je vous réponds que les peuples catholiques, même les plus petits, ne sont point dispensés d’être grands.

 

Trop tard ? Passons, Messieurs les dirigeants, autant de temps à faire quelque chose que nous en avons passé à ne rien faire ; dépensez, pour le réveil national, pour le redressement de la conscience collective, autant d’activité, autant de millions, autant d’esprit d’organisation et de propagande, propagande de husting, propagande de radio, propagande de journaux, qu’il s’en est dépensé, en cette province, depuis soixante ans, pour nous insuffler les passions insanes de la politique ; dépensez autant d’effort, pour nous éclairer et pour nous unir, que vous en avez dépensé pour nous aveugler et nous diviser ; et alors, vous pourrez parler de l’apathie populaire…

J’ajoute cette profession d’espérance :

Notre avenir nouveau, la jeunesse la plus intelligente, la plus allante, la plus décidée, le porte déjà dans ses yeux. Voilà pourquoi je suis de ceux qui espèrent. Parce qu’il y a Dieu, parce qu’il y a notre histoire, parce qu’il y a la jeunesse, j’espère. J’espère avec tous les ancêtres qui ont espéré ; j’espère avec tous les espérants d’aujourd’hui ; j’espère par-dessus mon