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sixième volume 1931-1939

Sur ce, Mgr Roy prétexte une laryngite aiguë pour s’excuser d’être absent et il me souhaite le bonsoir.

Ce soir du 29, le temps s’est gâté. Un orage se déchaîne sur la capitale : il vente, il pleut, il tonne. Des éclairs traversent les carreaux de l’amphithéâtre. En entrant au Colisée, je trouve une salle à moitié vide. Le cardinal Villeneuve est présent ; lord Tweedsmuir est là ; aussi, le représentant de l’Académie française, Louis Bertrand. Mais, sur l’estrade, des espaces déserts. Très peu de nos personnages officiels ; pas même la silhouette du premier ministre, M. Duplessis. Avait-on flairé quelque chose ? « Notons… que le soir mémorable où l’abbé Groulx a parlé, peut-on lire dans La Boussole (24 juillet 1937), il était édifiant de constater l’absence complète de toutes nos petites personnalités politiques. » Le juge P.-B. Mignault remplit les fonctions de président actif. La série des discours se déroule dans l’euphorie la plus moelleuse, dans une atmosphère de salon aristocratique. Après le juge Arthur Leblanc, lord Tweedsmuir, le juge Ferdinand Roy — un peu plus agressif celui-là ―, le Père Joseph Hébert, recteur de l’Université d’Ottawa, prennent la parole. Dans le vaisseau trop vide de l’auditorium, les voix résonnent comme des coups de cymbale. Pourtant, un peu avant dix heures, l’orage s’apaise. Et voici que la salle s’emplit. Des jeunes arrivent par groupes et se coulent dans les bancs silencieusement. Vers onze heures l’auditoire a pris corps. L’estrade n’est pas mieux garnie. En arrière de moi, j’aperçois pourtant le trio Grégoire-Hamel-Chaloult. Il est onze heures et quart. Mon tour