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VI

FIN DE PÉRIODE

Le discours du 29 juin 1937

Au pays de Québec tout commence et tout finit par un discours. En cette soirée du 29 juin 1937, on a voulu voir un point culminant de ma carrière. J’aurais touché un sommet. On l’a écrit. Sans fausse modestie, j’ai accompli, ce me semble, en ma vie, au service des miens, œuvres plus méritoires. Qui donc a surfait ce discours ? Qui en a haussé le sens, l’importance, a déchaîné autour de simples rappels d’histoire et de quelques périodes oratoires, trop oratoires peut-être, un enthousiasme bien imprévisible ? Qui ?… Qui ?… Une seule réponse : l’auditoire, un auditoire de jeunes qui, ce soir du 2e Congrès de la Langue française, s’est trouvé réuni au vieux Colisée de Québec. Et, pour la pleine intelligence de l’incident, il faut remonter plus haut que cette heure-là, repasser en bref, tout ce que furent pour moi ces années 1932-1937, années pleines d’une activité presque fébrile ; un public, s’il est vrai que j’en eus un, constamment tenu en éveil, en alerte, par la publication de cinq à six volumes, par des conférences de brûlante actualité, à Québec, à Montréal, ailleurs ; par une publicité plus que généreuse des journaux, publicité même de la jeunesse partout aux écoutes, jeunesse du grand chômage, facilement remuée par les moindres allusions à sa misère, par toute pitié qui descend vers elle. À Québec, je l’ai rappelé, je venais de terminer un cours d’histoire sur Champlain. L’auditoire avait rempli chaque soir le Palais Montcalm : auditoire composé, pour une large part, de collégiens du Petit Séminaire