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sixième volume 1931-1939

Québec qui se continueront pendant quatre ans, m’auront offert, je crois bien, si j’excepte l’ouverture de mes cours de 1915 à Montréal, la grande joie de ma carrière de professeur. Depuis que j’ai quitté L’Action française et que je me donne exclusivement à l’histoire, je me suis acquis — hélas pour combien de temps ? — la réputation d’un esprit rangé. Personne, pas même les politiciens, sauf quelques-uns peut-être, ne se sentent gênés au pied de ma chaire. À l’occasion de ces cours de 1937, « Un auditeur » écrit dans L’Action nationale de mai de cette année-là :

Ce sont des représentants de toutes les classes qui ont ainsi écouté ce conférencier sérieux avec une sympathie et un intérêt croissants. Nous y avons vu un grand nombre d’éducateurs, des prêtres et des religieux, quelques juges, des hommes de profession, des fonctionnaires, des commerçants, des ouvriers, etc.

À la dernière conférence, mes amis de Québec veulent conférer une certaine solennité. Il y a concert d’une petite maîtrise. Le cardinal Villeneuve est présent. À la fin il se lève pour prononcer les flatteuses paroles que lui inspire son amitié :

Je suis venu ici, ce soir, afin de manifester l’amitié que j’ai pour M. l’abbé Groulx, afin de lui apporter le sentiment de ma reconnaissance, au risque de scandaliser les faibles. M. l’abbé Groulx est l’un des maîtres de l’heure ; il est un de ceux à qui notre race doit davantage.

L’Action catholique, L’Événement de Québec, La Nation, Le Devoir, Le Droit font écho à ces paroles du Cardinal. À la fin de la soirée, on convoque quelques amis au Claridge. Et c’est banquet, discours chaleureux du directeur de L’Action catholique, le Dr Jules Dorion et de l’abbé Cyrille Gagnon. Je prononce moi-même une « émouvante allocution », paraît-il. Québec me faisait fête. Nous en étions à la fin d’avril 1937. Deux mois plus tard, ce serait le deuxième Congrès de la Langue française. À la fin de juin et après mon discours au Colisée, que me restera-t-il de l’unanimité québecoise ? Mais encore une fois je ne veux pas anticiper.