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dre Taschereau. Le 16 avril 1936, Eugène L’Heureux revient à la charge dans L’Action catholique et ne ménage pas le compliment : « Magistrale étude… d’une lecture passionnante pour tous les Canadiens français soucieux de leur avenir national. » Cet éloge s’adressait à la brochure qui allait contenir le texte de L’économique et le national. Le Devoir assuma les frais de cette impression. Monsieur Héroux, toujours généreux en sa publicité, se chargea d’assurer à la brochure une large diffusion. Il organisa une forme de publicité bien à lui : sur l’opportunité de cette réimpression en forme plus pratique qu’un rapport de journal, il sollicita des opinions. Dans le monde de mes jeunes amis, on ne se fit pas prier. « J’ai rarement vu conférencier produire sur son auditoire une influence aussi profonde », déclare Léo Pelland. « Véritable bréviaire du nationalisme canadien-français », assure Paul Bouchard. Le maire de Québec, J.-E. Grégoire, y va de son couplet : « Nos compatriotes ont besoin d’être réveillés et guidés au nom d’une doctrine patriotique orthodoxe et tonifiante. » Il ne restait plus qu’à lâcher le mot fatal, celui qui ne manquait jamais de me mettre mal à l’aise, pour son sens équivoque et pour les espoirs irréalisables qu’il risquait d’allumer : le mot « chef ». Je le trouve sous la plume de René Chaloult : « Comme l’an dernier, de nombreux juges et avocats ont écouté avec avidité notre chef national. » À peu près dans ces mêmes jours, le 21 février 1936, dans L’Action catholique, les Jeunesses patriotes, groupe de fondation récente et qui prêche crânement l’indépendance du Québec, ripostent à Edmond Turcotte, rédacteur en chef du Canada, qui m’a pris à partie : « Mais nous ne tolérerons jamais que vous veniez attaquer le chef spirituel de la