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mes mémoires

Je note, en avril 1934, une conférence à l’Université d’Ottawa, sur « Le dernier voyage de Cartier ». Une autre fois, tard, l’année suivante, le 29 octobre 1935, il m’est donné de m’exprimer sur Jacques Cartier et son œuvre. L’invitation, on le devine, ne me vient pas des milieux proprement officiels. Nous sommes à l’anniversaire de la visite de Cartier à Hochelaga. La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal décide de commémorer la grande date. À la manifestation du soir, au Monument National, elle m’invite à prononcer la conférence. La soirée est placée sous la présidence du maire de Montréal, Camillien Houde et de M. J.-Alfred Bernier, président de la Société. Et je serai flanqué de deux sénateurs, l’un pour me présenter, l’autre pour me remercier : les honorables Rodolphe Lemieux et André Fauteux Ont-ils voulu faire oublier certains incidents de l’année précédente ? Les deux sénateurs — deux de mes amis, au reste — s’entendent pour me couvrir de fleurs. Leurs allocutions et ma conférence ont été recueillies dans un petit volume publié par la Société Saint-Jean-Baptiste sous ce titre : Sur le Mont-Royal, Jacques Cartier. — Hommage au découvreur du Canada, octobre 1535-1935. J’y renvoie.

L’auditoire — une salle comble — écoute dévotement ma conférence. En cette année 1935, rien de plus facile que de dire des choses brûlantes. Et les choses brûlantes me viennent peut-être trop spontanément aux lèvres. Je ne manque point d’en dire en ma conclusion et qui ne ratent point leur effet. Des paroles assez dures secouent d’abord les assistants : « Au Canada tel fut, à son début, le rêve français. De ce rêve, qu’avons-nous fait ?… Pauvre peuple ! Que n’est-il possible, ce soir, de faire passer, sur son front penché et blasé, un peu du vent qui soufflait dans les vergues de l’Émérillon et de la Grande Hermine, vent enivrant