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cinquième volume 1926-1931

Que n’ai-je pris de notes sur un autre dîner que m’offre, le 17 février, Robert de Caix ? Il m’y ferait rencontrer, m’avait-il dit, son ami René Pinon, chargé de la chronique politique à la Revue des Deux Mondes. Soirée qui m’attire plus que bien d’autres. Je connaissais Robert de Caix bien avant mon voyage à Paris. Attaché au ministère des Affaires étrangères de France, il avait accompli, pour son gouvernement, quelques missions officieuses en Acadie et je crois, aussi, chez les Franco-Américains. De passage à Montréal, il m’avait quelquefois rendu visite. Beau type de Français : grand, presque colosse, point du tout nerveux, une merveilleuse possession de soi, ni vantard ni bavard, esprit très positif, habitué à traiter froidement les choses. Catholique fervent, sa famille, famille des Comtes de Saint-Aymour, était originaire de Saint-Louis, Missouri ; on y avait vécu. Origine coloniale qui contribuait à nous rapprocher. Lors de mon voyage de 1931, Robert de Caix s’entremit généreusement pour me rendre maints services dans les milieux officiels. Je connaissais aussi René Pinon, pour avoir lu, dans la grande Histoire de la nation française, son volume sur l’Histoire diplomatique, 1515-1928. Abonné, lecteur assidu de la Revue des Deux Mondes et depuis longtemps, je ne manquais jamais de lire la chronique régulière de Pinon, je veux dire, sa revue de la politique : aperçus si sereins, si objectifs sur les comportements de tous les pays du monde. Malheureusement, ai-je dit, débordé par toutes ces rencontres et réceptions qui se succédaient parfois à deux et trois par jour, je n’ai rien recueilli sur ce dîner chez l’ami de Caix. Je me souviens pourtant que je refusai d’entretenir des choses du Canada deux hommes qui les connaissaient peut-être mieux que moi. J’orientai plutôt la conversation vers une sorte de chronique de la Revue des Deux Mondes. Et le souvenir m’est au moins resté du magnifique panorama qu’aidé, stimulé parfois par son ami de Caix, René Pinon, le plus simplement du monde, comme en se jouant,