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mes mémoires

gnage produit lors de nos échanges de correspondance avec Henri Bourassa en 1913. L’abbé Charrier n’a-t-il pas écrit précisément au sujet de l’enseignement de l’histoire du Canada dans les collèges de son temps : « Mais aussi, qui eût cru alors que nos annales eussent de quoi séduire de petits Canadiens ? »

Pourquoi ne pas consigner également ici le témoignage d’un prêtre éminent de Montréal qui venait de m’écrire :

Du temps de Lantagnac, on ignorait à peu près tout des réalités canadiennes. En géographie, on recherchait avec soin les sources du Rhône ; il importait peu de remonter le Saint-Laurent jusqu’aux grands lacs. On apprenait par cœur les noms de tous les départements de la France ; la province de Québec n’était pas jugée digne de retenir quelque peu notre attention. En histoire, on finissait par savoir qu’il y eut un jour une colonie française jetée sur nos bords ; un ouragan emporta de l’autre côté de l’Océan, le drapeau français. La colonie française devint colonie anglaise. Elle l’était encore à cette date. Qu’en était-il advenu ? Quels seraient un jour nos devoirs envers elle ? A-t-on jamais, à cette époque, éveillé en l’âme de l’élève ses responsabilités de Canadien français, la fierté de sa race, le désir de la servir ? Si on l’a fait, je n’en eus, certes, jamais connaissance.

Il fallait clore ce débat. J’avais gardé en réserve quelques grosses cartouches. Je citai quelques faits aussi péremptoires qu’inconcevables : par exemple, l’enseignement de l’histoire canadienne, bel et bien donné à une époque, en deux collèges au moins du Québec, à l’aide d’un manuel anglais et protestant, manuel dont un abrégé français avait trouvé place dans les petites écoles catholiques et françaises de la province, avec la haute approbation de nos autorités scolaires. Je ne m’arrêtai pas là. L’heure me parut propice à la résurrection d’un mauvais souvenir qui m’était resté sur le cœur depuis les derniers jours de ma Rhétorique. Je rappelai donc à mes contradicteurs de Québec le fameux sujet de discours qui, selon toute apparence, nous était venu de l’Université Laval elle-même :

Si le professeur de Québec, disais-je à l’abbé Maheux, eût cherché davantage, dans les archives autour de lui, il eût trouvé, par exemple, dans l’Annuaire de l’Université Laval (Québec), pour l’année 1897-1898, à la page 156, un sujet de composition…