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mes mémoires

ton ? Pourquoi arrive-t-il à l’arbre de mourir arbrisseau ? Je devrais aussi nommer Yves Tessier-Lavigne, original, non dénué de talent, professeur à l’Université, spécialiste en géographie, un autre qui est resté fruit vert et qui paraissait bâti pourtant pour une œuvre de belle maturité. Je me garderai d’oublier Esdras Minville, ce jeune primaire, qui, à force de travail personnel, deviendrait un magnifique autodidacte, un sociologue réputé et un homme de pensée. Je me dois encore de crayonner, ne serait-ce que d’un trait bref, un autre de nos directeurs, entré à l’Action française en 1922 et dont la collaboration se fera active : Arthur Laurendeau, maître de chapelle à la Cathédrale de Montréal, professeur de chant. Celui-là, c’est l’artiste, non pas égaré dans l’action, mais tenté par l’action. Esprit fin, entier toutefois avec une légère pointe de bravoure à la mousquetaire, capable, par conviction et flamme intérieure, d’écrire les choses les plus osées. Arthur Laurendeau, ce sera aussi l’homme qui, avec les années, se dégageant de je ne sais quel maniérisme ou hermétisme, se construira un style très personnel, original, où l’élégance habillera une pensée vigoureuse, tranchante, pleine.

Tel est le groupe d’hommes qui, à la direction de l’Action française, se feront mes collaborateurs. Mis à la tête de la principale des œuvres de la Ligue, forcé d’y consacrer plus de temps que mes autres collègues, en relation plus immédiate avec l’administration et la clientèle, je deviendrai, par la conjoncture des choses,