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l’on est en train de supprimer le caractère original, national et catholique de notre scoutisme. Un mémoire justificatif accompagne cette lettre. Le notaire Fréchette intervient de même auprès de Nosseigneurs de Chicoutimi et de Rimouski, auprès de l’abbé Philippe Perrier. L’aumônier des Scouts de Montréal, gravement inquiet, m’adresse à moi-même un mémoire. L’aumônier des scouts de Notre-Dame-de-Grâce, le Père Marc Labonté, un Dominicain obscur mais remuant, multiplie les démarches en sens inverse. À Montréal, les autorités religieuses se déterminent à la résistance et y poussent de toutes leurs forces. En 1933, Mgr Georges Gauthier fait même un voyage à Québec pour mettre en garde le cardinal Villeneuve. Les intentions du cardinal Villeneuve paraissent en effet assez troubles. Sous quelles pressions ou inspirations, l’on n’a jamais su, le cher Cardinal pose-t-il, depuis quelque temps, des gestes étranges ? On l’eût dit en fervente coquetterie avec les personnages officiels, avec les partisans du canadianisme tout court, par trop accessible à leurs manigances et à leurs flatteries. Le 11 décembre 1934 ou le 31 janvier 1935, je ne sais plus, une réunion a lieu, dans la capitale québecoise, des représentants des diverses sections du scoutisme catholique de la province de Québec. Le Cardinal impose sa volonté. Les résistants, y compris ceux de Montréal, n’ont qu’à s’incliner. Les Éclaireurs ont vécu. On adopte un projet d’affiliation à la Boy Scout Association. Le titre de Canadien français est retranché aux Scouts fédérés ; l’Union Jack remplace le drapeau de Carillon ; la blouse verte internationale remplace la blouse bleue des Éclaireurs. En guise de consolation, le Cardinal fait cette promesse aux Éclaireurs réunis au Marché Saint-Jacques, en février : « Nous voulons même que le mouvement garde le caractère national qui convient et son visage canadien-français. Nous