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quatrième volume 1920-1928

Ce jugement de la mère ne diffère pas beaucoup de celui que porte, quelque six ans plus tard, Papineau lui-même, sur la demoiselle Azélie qui peut avoir alors seize ou dix-sept ans. Comme elle part en promenade chez son frère Amédée et que Papineau a grande estime pour sa bru, il écrit à son fils :

Azélie a besoin de la bonne compagnie de notre chère Marie pour se former sur l’exemple d’excellentes manières, de douceur et de modestie qu’elle verra à chaque instant chez une personne accomplie, qu’elle aime et qu’elle ne pourra s’empêcher de vouloir imiter de loin. Avec beaucoup de douceur et de précaution, prémunis Azélie contre la vivacité de son tempérament et sa précipitation à vouloir avoir le dernier mot n’importe avec qui. Les prix qu’elle a remportés si souvent lui ont inspiré un peu plus de présomption qu’il n’en faut pour être aimable. Elle a sa bonne part d’esprit et de talent. Elle n’a pas l’éducation du monde et des manières à beaucoup près autant que je souhaiterais (Corr. X : 149).

Papineau est bien aise toutefois de trouver, en sa fille cadette, plus de caractère et d’esprit viril, qu’en son fils aîné. Une spirite est passée par le manoir. Les tables tournantes, stylos ou crayons parlants sont en pleine vogue. Amédée Papineau s’y est facilement laissé prendre. Son père lui écrit (7 septembre 1853) :

Azélie a plus d’énergie, de résistance que Mr Amédée. Les agitations nerveuses de la main de Mde Beach placée sur celle d’Azélie a fait produire au crayon mille zigzags, mais pas un mot (Corr. XI : 55).

Cette jeune fille, avec ses admirables qualités, — une surdouée, — porterait-elle en soi quelque chose de trouble ? Elle est née en 1835 aux pires années d’énervement et d’excitation pour son père. De quelle maladie est-elle frappée au mois d’août 1856, maladie qui jette toute sa famille en si vive alerte ? Quelques bouts de lettre laissent soupçonner une catastrophe. Papineau écrit à Mme Maurice Laframboise, sa nièce (12 août 1856) :