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troisième volume 1920-1928

même chose. Et voilà pourquoi, à nos amis les journalistes, et à tous ceux-là qui déplorent l’échec du fédéralisme au Canada et qui s’en prennent exclusivement aux autorités fédérales et aux fonctionnaires fédéraux, ai-je toujours dit et répété : pourquoi ne pas vous en prendre tout autant à la poltronnerie de nos représentants ? « Frappez donc à la tête ! » n’ai-je cessé de rabâcher. À L’Action française, on frappait à la tête. En octobre 1923, je dédie à nos représentants fédéraux, ce bas de page, sous ce titre qui ne manque aucunement de verdeur :

La farce (ou l’insulte) continue

Il y a un mois et plus que les protestations s’élèvent de toutes parts dans notre province contre cette version française du Bulletin des renseignements commerciaux qui paraît 40 jours en retard sur la version anglaise. Cette version française devient ainsi parfaitement inutile, un pur gaspillage des fonds publics et une insulte à la population française à qui l’on se permet d’offrir une publication aussi risible. Cependant quelques bons fonctionnaires unilingues de la race supérieure continuent là-bas cette comédie insultante, avec un flegme qui n’a d’égal que notre inconcevable patience. Après les révélations de M. Léo-Paul Desrosiers [alors correspondant parlementaire du Devoir à Ottawa] sur notre éviction du fonctionnarisme fédéral, c’est à nous demander une fois de plus si les Canadiens français ont bien quelques ministres à Ottawa et voire jusqu’à une soixantaine de députés.

Ainsi une plume frémissante se peut-elle changer en gourdin. Et l’on n’a plus à s’étonner de l’amitié que m’ont toujours portée les politiciens.

Un autre jour de la même année, dans une page, où je fais parfois passer l’excédent de ma chronique de « La vie de l’Action française », je reviens à la charge sous ce titre assez pressant :

Il faudra bien qu’ils marchent

Il faudra bien que nos députés se décident enfin à s’occuper de la défense de la langue française à Ottawa et de la situation des nôtres dans les services de l’État fédéral. Les protestations s’élèvent peu à peu. « Jamais un parti politique n’a eu autant de support de la province de Québec qu’au temps actuel, nous