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LE CHOC SAUVEUR

limitait à une heure par jour, non pour chaque classe d’écoliers, mais pour chaque école. Encore l’usage de ce maigre privilège demeurait-il subordonné à la condescendance d’un inspecteur protestant ; et, prescription plus grave, ne serait autorisé que dans les seules écoles bilingues fondées avant l’édiction du Règlement XVII.

Ce soir-là, au lieu de sauter dans le tramway, Lantagnac prit le chemin du pont interprovincial, pour se rendre à Hull chez le Père Fabien. Un frisson mêlé de honte et de fierté secouait tous ses nerfs. L’acte héroïque du sénateur le faisait rougir de ses tiédeurs et de ses lâchetés.

— En voici un, réfléchissait-il, qui n’a pas dû trouver que des approbations autour de lui, parmi les membres de sa famille, parmi ses amis politiques. Mais voilà ! il n’a pris conseil que de sa conscience et des intérêts de sa cause.

Quand il songeait à ce vieillard de soixante-dix ans jetant ainsi à la face de ses chefs, le titre honorifique par lequel ils espéraient le tenir, se délestant des honneurs pour rester fidèle à l’honneur, Lantagnac cédait franchement à une jouissance d’orgueil :

— Quel coup cinglant à la face des politiciens ! Quel réconfort pour ceux qui luttent ! monologuait toujours l’avocat. Et comme il y a longtemps que notre scène politique n’a vu pareil geste.