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L’APPEL DE LA RACE

Lantagnac fit alors à ses enfants, de sa voix chaude et enthousiaste, la description de la terre paternelle, la terre des Lantagnac dit Lamontagne, telle qu’il venait de la revoir après plus de vingt ans. Il leur décrivit la maison, refaite, mais subsistante encore en beaucoup de ses parties antiques ; il peignit les « bâtiments » entièrement remodelés, remis au point des plus récents progrès ; il leur parla de leurs cousins dont le diplôme de bacheliers de l’École d’Oka s’étalait dans le salon de famille ; il fit défiler le beau troupeau de vaches Holstein, montra les larges pièces de la terre drainées et roulées, fit évoluer les attelages percherons traînant les machines agricoles les plus modernes : le semoir-automatique, l’épandeur de fumier, la herse à roulettes, la lieuse, etc. Au-dessus du paysage il dressa enfin la silhouette des ormes géants épandant leur parasol royal dans la lumière blonde des soirs. Et ce fut un enthousiasme. Sur-le-champ, tous voulaient partir pour Saint-Michel, pour une visite chez ces braves Lamontagne du rang des Chenaux.

C’est ici que Lantagnac attendait ses enfants.

— Non, leur dit-il, pas maintenant.

— Et pourquoi donc ? risqua Nellie.

— Mais parce que vos parents de Saint-Michel ne comprendraient pas votre patois, ma pauvre enfant, lui jeta son père, riant de bon cœur.