Page:Groulx - L'appel de la race, 1923.djvu/204

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
204
L'APPEL DE LA RACE

après tout, conclut-il avec force, l’endurance d’un peuple est une puissance finie ; elle a ses limites. Cette réponse allait aider le Père à élever encore le débat :

— Oui, reprit-il, avec quelque solennité, oui, mais la ténacité du persécuteur a aussi les siennes. Quant à celle des persécutés, ne lui marquons pas trop vite, je vous prie, son terme et son épuisement. Quand un peuple a conscience de se battre pour les plus hauts objets de sa vie spirituelle, moi, je crois aux sources d’énergies dont la profondeur ne se sonde point. Lantagnac, rappelez-vous cette petite religieuse condamnée à une opération chirurgicale, et refusant le chloroforme parce qu’elle voulait, disait-elle, offrir sa souffrance pour la cause des écoles. Rappelez-vous l’histoire de cette humble femme de peine rentrant un matin à l’Université pour sa journée de travail et déposant d’abord dans un coin, le gourdin qui lui avait servi la nuit, à monter la garde à l’école de son quartier. Faudra-t-il évoquer de nouveau, devant vous, le geste de ces modestes pères de famille de Green Valley bravant une condamnation à cinq cents piastres d’amende ou à six mois de prison, puis logeant leurs enfants dans un pauvre hangar, pour garder le droit de faire enseigner le catéchisme en français ? Revoyez après cela, s’il le faut, la légion de nos religieux et de nos religieuses, celle de nos institutrices enseignant depuis trois ans, sans un sou de rétribution ; comptez les petites maîtresses