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L’APPEL DE LA RACE

prendre le diapason, à ajuster sa voix. Dès les premiers jours, il conquit l’oreille des ministres. Aux premiers bancs de la droite, les têtes se faisaient plus attentives quand résonnait sa parole toujours claire, toujours nourrie, d’une si impeccable distinction. Bientôt cette opinion fut faite, dans les cercles politiques, que le député de Russell n’aurait qu’à le vouloir pour gravir les plus hauts postes.

Malheureusement pour les Fletcher, là s’arrêtèrent les gages que Jules de Lantagnac parut vouloir donner à leurs espérances. En même temps que sa culture intellectuelle, on le vit bientôt qui poursuivait avec une ardeur non moindre, l’affranchissement de son être moral. Une ambition fébrile poussait ce grand honnête homme à combler ce qu’il appelait « le vide affreux de sa vie ancienne ».

— En somme, s’accusait-il parfois, c’est de vingt ans d’arrérages que je suis comptable à ma race.

Il croyait à une étroite solidarité entre les races et les familles, au retentissement des fautes comme des bonnes actions à travers les générations. Quand il se rappelait les capitulations des familles nobles canadiennes, au lendemain de la conquête de 1760, la peur le prenait que la fatalité d’une expiation pesât sur sa propre famille. Du reste, il redoutait pour ses enfants, le péril de la richesse, le péril de l’anglicisation déjà commencée. Quelle désolante nouvelle n’avait-il pas