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assommés. Les hommes de Colombet essaient, mais en vain, de retraiter vers un petit fort sis à quelque distance ; quinze restent sur la place ou sont faits prisonniers. Mais un peu comme Dollard au Long-Sault, a dit un de nos historiens, les hommes de Colombet arrêtent une partie de l’invasion et sauvent les soldats de Frontenac d’une attaque en plein dos.

Me pardonnera-t-on de rappeler ce souvenir avec quelque émotion ? Ce jour-là, mon vieil ancêtre, le premier et le seul de notre nom qui soit venu au Canada, se trouva de la bataille. C’est, du reste, près d’une coulée qui longeait sa terre qu’eut lieu le combat. Le soir il était au nombre des prisonniers. Et Jean Grou eut l’honneur d’être brûlé quelques jours plus tard dans le village des Onneyouths. Nous conservons encore dans la famille un crucifix apporté de France en 1670 par ce vieil aïeul normand. Et j’ai songé quelquefois, devant cette relique, qu’un jour une pauvre femme désolée avait pleuré sur ce Christ d’argent son deuil suprême, mais qu’à ses larmes avait dû se mêler beaucoup de fierté.