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palmiers. Partout leurs yeux s’ouvrent à une immense et opulente nature ; partout les incidents de voyage, les aventures de toute sorte se multiplient. Et se multiplient aussi les exploits des trappeurs, des hardis canotiers, comme une série d’épisodes épiques qui vont s’agrandissant, se surfaisant dans un mélange glorieux de vérité et de légende.

Un de ces printemps ils réapparaissent à Montréal, à la file, avec leurs canots chargés de hauts paquets de castor, de peaux d’orignal, de bœuf illinois. Après qu’ils ont livré leurs marchandises, reçu leurs gages, qu’ils se sont acheté au magasin de beaux habits avec des dentelles et des rubans dorés, toujours les plus beaux et les plus chers, qu’ils ont mis à leur doigt quelque bijou, en ont acheté un autre pour leur « maîtresse », ils partent dire un bonjour aux vieux, à la maison de la côte.

Ah ! que ne possédons-nous quelque récit de ces fêtes du retour ? Que ne puissions-nous recomposer les récits enchantés qu’y déroulait l’imagination enflammée des « chevaliers de la forêt vierge ? » Ou encore que n’est-il possible d’aller nous asseoir aux vieux foyers de jadis, alors qu’en l’absence des enfants exilés, pendant les veillées d’hiver, dans les maisons bien closes par le froid, où chacun se reprend à la vie intérieure de la famille, alors que le vent hurle aux contrevents et dans la cheminée, qu’il chante et qu’il sif-