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Les enfants ! Voici bien, dans la maison canadienne, la plus riche partie du mobilier. Ce que d’autres redoutent comme un péril de pauvreté, nos pères l’appellent richesse. Chez eux « les religions du travail, de la foi et de la famille s’unissent », comme eut dit Étienne Lamy. Ils sont un peuple presque entièrement rural, agricole, et « le grenier de la moisson humaine comme des autres est la terre ». Chez les anciens Canadiens, la règle, dans les ménages qui se respectent, est de se rendre à une première douzaine d’enfants, de dépasser souvent la seconde, et la maison n’est jamais si joyeuse que quand elle est pleine. Quels splendides repas autour de la vaste table où, « quand ils sont seuls », ils sont 24 ou 26, quelquefois 30 ou 32. M. de Muy entreprit un jour le recensement des petits-fils de Pierre Boucher : il en compta cent cinquante. L’autre jour mourait dans ma paroisse, à Saint-Michel de Vaudreuil, Madame Joseph Brasseur, âgée de 99 ans et 6 mois. On lui a compté 222 descendants. Dans ma famille je connais tel aïeul de la deuxième génération qui eut à lui seul vingt enfants et qui, j’en suis sûr, en fit paraître beaucoup d’orgueil. Hélas ! le pauvre vieux fut bien puni de sa vanité. Il vécut assez longtemps pour compter dans la famille d’un seul de ses petits-fils, quelque chose comme vingt-six enfants. À ce compte, de huit qu’ils étaient chez