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les explorateurs contemporains.

hommes toujours prêts à la révolte se trouvent sans moyens d’attaque ; si les ressources que pourrait nous procurer la chasse ont à en souffrir, la discipline y gagnera d’autant.

— Vous avez raison, reprit le météorologiste et peut-être devrons-nous notre salut à cet accident qui paraît devoir causer notre perte.

Les vivres sauvés étaient en très petite quantité ; ils consistaient en quelques biscuits et une boîte de pemmican. C’est, nous l’avons dit, une sorte de préparation faite avec de la viande hachée, condensée et mélangée de graisse, qui se fait surtout dans les provinces du nord de l’Amérique et qui se conserve intacte très longtemps, surtout dans les régions froides. Dans tous les voyages polaires, on a le soin d’en emporter de grandes provisions et c’est une précieuse ressource dans les cas de disette.

Qu’on ajoute à ces provisions bien maigres pour nourrir dix-neuf personnes, quelques kilogrammes de viande de phoque conservée dans la glace et la ration de dix personnes environ de chair d’ours blanc, et l’on verra quelle anxiété dut s’emparer de tous, quand on connut la véritable situation de la troupe naufragée.

Le mâle courage des deux Esquimaux et la douce résignation de leurs compagnes rendirent pourtant quelque espérance aux moins anéantis.

— Avec nos armes, dit Joë, nous ne mourrons pas de faim pourvu que Dieu nous envoie quelque proie.