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les explorateurs contemporains.

russes, ils n’avaient en réalité que des croyances bien rapprochées du plus grossier fétichisme. Quand le temps se montrait trop défavorable, ils tiraient des coups de fusil contre le soleil, disant que Jésus-Christ se montrait ingrat envers eux et pensant ainsi le punir de son abandon.

Bien que mariés avec les femmes qu’ils avaient avec eux, ils ne se faisaient nul scrupule, sous le moindre prétexte, de briser les liens conjugaux et de répudier leur épouse pour prendre celle du voisin qui se dédommageait par un échange à l’amiable.

Leur principale nourriture consistait en poisson cru ou en chair de phoque qu’ils mangeaient ainsi sans répugnance. Ils buvaient aussi souvent à pleins verres l’huile de poisson et le sang chaud des rennes, prétendant, peut-être à juste titre, que c’était là un moyen assuré de se préserver du froid et du scorbut.

On atteignit ainsi le printemps et le retour du jour. Quand on en fut au mois de mars, la provision de bois de chauffage était complètement épuisée, mais on ne pouvait encore songer à se passer de feu. La maison de bois fut condamnée à servir de combustible, et on la remplaça par une spacieuse tente faite de peaux de rennes cousues ensemble.

L’hiver continuait froid et implacable, et l’on entrevoyait déjà l’époque où le bois provenant de la cabane viendrait à manquer à son tour. Chaque jour on regardait vainement la pleine mer, espérant voir commencer la débâcle des glaces. Les Samoyèdes avaient, en dehors de leurs petites barques, un bâti-