Page:Gros - Les explorateurs contemporains des régions polaires, 1881.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
13
mort de rené bellot.

taillèrent dans la glace une sorte de maison souterraine qu’ils recouvrirent avec la toile qu’ils n’avaient pu utiliser. C’est de cet abri que sortit, quelques instants après qu’il eut été terminé, l’infortuné lieutenant. À peine fut-il debout sur la glace qu’une rafale de vent, s’engouffrant dans son manteau, l’emporta en avant avec une force irrésistible. Une large fissure s’ouvrait dans la glace, sous ses pas ; il y fut précipité, sans même avoir le temps de se reconnaitre.

Le matelot Johnson, ne le voyant point revenir dans l’abri où il était demeuré avec son compagnon, commença à s’inquiéter vivement. Il sortit à son tour ; mais vainement il appela, vainement il fit le tour du bloc de glace qui lui servait de refuge : il ne vit que le profond abîme dans lequel notre infortuné compatriote avait disparu et où les vêtements qui l’enveloppaient l’avaient sans doute empêché de nager et de s’accrocher aux aspérités de la glace.

Telle fut la mort de l’héroïque René Bellot. L’Angleterre, pleine d’admiration pour son courage et son dévouement chevaleresque, a élevé à sa mémoire, dans l’hôpital de la marine de Greenwich, un modeste monument en granit rose, sur lequel les Français peuvent avec orgueil lire son nom. D’autre part, on peut voir au musée du Louvre, dans la partie consacrée à la marine, un autre monument commémoratif élevé à la mémoire de ce jeune héros par les soins des Anglais résidant en France.