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plaire. Elle est extrêmement rangée et observe une sage économie. Quand il neige chez les hommes, c’est elle qui secoue son lit de plume, dont le duvet vole dans l’air. Elle punit les fileuses paresseuses, en salissant leur quenouille, brouillant leur fil ou mettant le feu à leur lin. Les jeunes filles, au contraire, qui filent avec ardeur, elle leur envoie des fuseaux et file elle-même pour elles pendant la nuit, de sorte que le matin leurs bobines se trouvent pleines. Quand les filles sont paresseuses, elle leur tire la couverture de leur lit et les met toutes nues sur le pavé ; et celles qui sont laborieuses, qui le matin, de bonne heure, portent de l’eau à la cuisine dans des cruches bien nettoyées, y trouvent des pièces d’argent. Elle attire volontiers les enfans dans son étang ; elle porte bonheur à ceux qui sont bons, et fait des misérables de ceux qui sont mauvais. Tous les ans, elle parcourt le pays et répand la fertilité dans les campagnes ; mais aussi elle jette l’épouvante, quand elle parcourt la forêt, à la tête d’une armée furieuse. Tantôt elle se montre, sous la figure d’une belle femme blanche, au fond ou à la surface de son étang ; tantôt elle y est invisible ; seulement on entend dans la profondeur un bruit de cloches et un sourd frémissement.